It is raining again

« Le roi s’en alla, s’en alla sur son bateau
Hisse et ho, hisse et ha, le roi s’en alla
Pêcher un poisson pour sa fille bien aimée
Un poisson de la mer, la mer méditerranée »

Alyosa avait, sans s’en rendre compte, reprit la dernière phrase en chœur avec la cher. Elle aimait bien cette comptine que sa mère chantonnait en brodant. Au souvenir de sa mère, elle s’enfonça un peu plus dans la banquette de la voiture et resserra les pans de sa cape rouge à capuche et caressa du bout de l’index droit une partie des broderies noires qui recouvraient son manteau.

*J’espère que tu es heureuse petite maman*

En tout cas, plus heureuse que l’adolescente l’était. Certes, elle avait quitté son père mais plus elle se rapprochait de son futur lieu de vie, et plus elle avait peur. Le paysage était sinistre, le temps lugubre. Seul le chant du cocher égayait cette soirée pour le moins macabre. On ne peut dire que le reste du voyage avait été plus joyeux. La jeune fille, peu habituée à l’extérieur, avait formellement refusé de dormir ailleurs que dans la voiture. Le cocher, heureusement, avait vénéré sa mère pendant de nombreuses années et avait supporté les caprices de la demoiselle (vaillamment, d’ailleurs).

Demoiselle qui sortit d’une poche intérieure de sa cape un petit miroir ouvragé. Non, a part un teint exceptionnellement pâle, rien ne montrait qu’elle avait passé 15 ans dans l’aile du château familial. On pouvait même dire qu’elle était jolie, avec ses cheveux écarlates attachés en chignon. Par contre, le fait qu’elle était en deuil était assez évident, si on regardait sa robe noire aux manches bordées de dentelles, ses bas noirs et ses bottines de la même couleur.

« On est arrivés, Mamzelle !! »

Alyosa rangea le miroir, tâta sa robe au niveau du col pour vérifier que son crucifix était bien là. Elle pouvait affronter Satan en personne. Le cocher ouvrit gentiment la porte et aida Alyosa à descendre. La jeune fille se retrouva sous une pluie battante et s’enroula un peu plus dans sa cape, après avoir rabattu sa capuche sur son visage. Après avoir posé ses valises, le cocher s’en alla sur un dernier salut.

*Veillez sur moi petite maman, a présent *

Tant bien que mal, elle souleva ses valises et se dirigea vers l’entrée du bâtiment.

Amrit glissa plus qu’il ne descendit de son cheval. L’animal fit un pas de côté, bousculant le jeune garçon, qui manqua de trébucher dans la boue. Dans la petite suite qui l’accompagnait, on ne fit pas de commentaires. Amrit remercia mentalement ses hommes du respect témoigné, puis se demanda furtivement si les moqueries commenceraient une fois que ses nobles et fragiles oreilles seraient hors d’atteinte.
Le domaine de Rosenschloss s’étendait devant ses yeux. Une large cour menait au château, et la fontaine qui l’ornait clapotait joyeusement. Amrit nota le bon entretient des plantes, la propreté du sol trempé par la pluie et la beauté de la bâtisse qui l’attendait là-bas. Il ignora volontairement le gris sombre et humide du ciel et l’atmosphère sinistre qui pesaient sur lui depuis bien des lieues.
On confia les chevaux à l’un des hommes, puis on débarqua les bagages du jeune-homme vers le domaine. Amrit se chargeât lui-même du transport de Doyel, sa petite femelle faucon préférée. Il savait que le domaine ne possédaient pas les aménagements nécessaires à l’art de la fauconnerie, mais un seul oiseau pourrait facilement loger à l’écurie, à condition de le sortir souvent. Amrit haïssait l’équitation, et les chevaux le lui rendaient bien, alors si son rapace faisait perdre sa place à un stupide canasson, tant mieux !

Une fois les valises entreposées devant le porche du château, le chef de la petite troupe s’adressa à Amrit :« My Lord, tout est en ordre. Préférez-vous que nous restions encore, ou bien pouvons nous reprendre la route ?
-Je vous remercie de m’avoir accompagné jusqu’ici. Bien sur, vous pouvez partir maintenant, je saurais me débrouiller. Je vous saurais gré de présenter mes salutations à mon père, et de l’informer que mon emménagement s’est bien passé. »
Après tout, comment cela pourrait-il mal de passer ? Amrit se jura d’écrire bientôt à son père, Lord McStone, afin de raconter plus en détail son voyage et son arrivée au pensionnat.
L’homme acquiesça, puis, sans un mot, les hommes qui avaient accompagné le jeune garçon jusqu’ici s’éloignèrent.

Amrit les regarda disparaitre sous la pluie, puis se retourna. Il sursauta légèrement en apercevant une jeune fille à la chevelure flamboyante, manifestement arrivée en même temps que lui, qui portait ses bagages vers la porte du batiment.
Comment avait-il pu ne pas remarquer la demoiselle ? Peut-être à cause de la tenue extrêmement sombre de cette dernière ? Peut-être à sa façon de se mouvoir lentement, comme si chacun de ses gestes était le résultat d’un léger coup de vent…
Voyons, qu’avait dit son père ? Amrit se devait de se conduire comme un parfait gentleman.
Il salua la jeune demoiselle d’une courbette, et s’adressa à elle dans son meilleur allemand :
« Mademoiselle, si vous me le permettez, je serais heureux de vous aider à porter vos valises. Laissez-moi-vous aider. » Après un instant, il ajouta, parce qu’il vaut toujours mieux en faire trop que pas assez : « S’il vous plaît. »

« Mademoiselle, si vous me le permettez, je serais heureux de vous aider à porter vos valises. Laissez-moi-vous aider. »

Alyosa sursauta. Elle était tellement plongée dans ses réflexions, qu'elle n'avait pas entendu son interlocuteur arriver. Elle pensait à sa chambre, à son cocon , à sa petite vie tranquille perdue à jamais. Elle tenta de se reprendre et inspira profondément. Comment devait elle se comporter ? Devait elle lui tendre ses valises, réclamer un baisemain, se présenter ? Tant de question au quelle elle était incapable d'apporter de réponse. Ses genoux se mirent à trembler légèrement; pour se donner une contenance, elle serra encore plus fort les poignées de ses malles jusqu'à faire blanchir les jointures de ses mains délicates.

Enfin, elle se décida à répondre.

"Je ne voudrais pas vous ennuyer, monsieur...monsieur ? Je crois que vous aurez fort à faire avec les vôtres, ne vous encombrez point des miennes"

Bien, Alyosa, Bien. Il va croire que tu l'insulte. Décidément, tu n'es pas terrible au jeu des questions réponse, n'est-ce pas ? Et arrêtes donc de trembler, tu es pathétique. Le froid ? La pluie ? Et alors ? Tu n'es qu'une sale gamine gâtée et molle, voila ce que tu es. Fais au moins l'effort de te présenter comme une personne civilisée, tu auras au moins réussi ça !

"Je m'apelle Alyosa Tiourine"

Bien! Et qu'est-ce qu'on dit quand on est bien élevé ?

"Je suis la fille du Duc de Tiourine"

Voilaaa!!!!!!!!!!
Alyosa se permit un petit sourire, après tout, elle s'était plutôt bien comportée, non ? Un petit éternuement brisa ses espoirs de paraitre éduquée. Ils étaient sous la pluie depuis une dizaines de minutes, il mettrait peut être ce petit bruit sur le compte de la pluie, avec un peu de chance.

"Il serait peut être raisonnable d'aller nous abriter, je crois."

Amrit se maudit intérieurement : Dès sa toute première conversation, il avait enchainé les erreurs : Oublier d’annoncer son nom, effrayer la jeune demoiselle (La moindre des politesses eut été de tousser discrètement pour signaler son arrivée), ignorer la pluie qui les trempait tous deux…
Cette jeune fille semblait mille fois mieux éduquée que lui, dix-mille fois plus adaptée à la vie en bonne société !
Il se dépêcha de frapper la lourde porte du château au moyen du heurtoir de bronze qui l’ornait, puis il se retourna vivement vers son interlocutrice.
« Excusez-moi, mademoiselle, je manque à tous mes devoirs en omettant de me présenter. Mon nom est Amrit McStone. » Il grimaça en prononçant le patronyme, dont le nom et le prénom semblaient si peu assortis… « Je viens d’Ecosse, où mon père siège à la Chambre des Lords. »
Quelles étaient les bonnes manières à tenir dans ce genre de situation ? Amrit devait-il baiser la main de la jeune fille, ou bien attendre que celle-ci ait posé ses bagages ? Une fille de Duc était-elle une Duchesse, ou se titre était-il uniquement réservé aux épouses ? Un parfait gentleman se devait-il d’insister, et porter ses valises malgré tout ?
« J’entends du bruit, finit-il par dire. Je pense que quelqu’un vient nous ouvrir. » Aussitôt, il s’écarta, afin de laisser la demoiselle entrer en premier. Pour ça au moins, il connaissait la marche à tenir !
Quelques secondes plus tard, la lourde porte s’ouvrit devant le majordome du château, et étant donné la tête du bonhomme, Amrit se demanda presque s’il n’aurait pas été plus galant d’affronter cette apparition à la place de la jeune fille.

[Je me base sur le sujet « Une arrivée… » pour prévoir comment l’accueil au pensionnat s’organise : J’imagine que c’est plus où moins pareil pour tous les nouveaux élèves ]

Heureusement, ce fut le jeune homme qui frappa à la porte. Alyosa n’aurait jamais eu l’audace ne serais-ce que d’effleurer le heurtoir. Comme d’habitude, sa couardise l’immobilisait sur place. Quand il eu frappé, rien ne se produisit pendant quelques minutes ce qui lui permit de se présenter, lui et sa situation.

« Itchou Itchou Itchou »

Chacune des déclarations d’Amrit était accompagnée d’éternuements de la part d’Alyosa Il devenait urgent de s’abriter avant que son bout de nez déjà bien rouge n’explose à force d’éternuements Pourtant, sa nourrice lui avait bien dit d’éviter les courants d’air, la pluie, elle qui était si fragile … après tout, sa chère maman n’était elle pas morte d’une faiblesse aux poumons ? Hors de question que la fille la suive dans la tombe. Dans sa valise, la demoiselle se trimbalait donc une quantité astronomique d’étoles et d’écharpes tricotées avec amour sans conter ses médicaments contre la toux.

Elle déplia un mouchoir d’une blancheur immaculée brodé à ses initiales tout en réfléchissant au discourt d’Amrit. Ainsi il venait d’Ecosse ? Intéressant. Peut être vivait il près d’un de ces fameux Loch, le Loch Ness, pourquoi pas. Alyosa avait lu plusieurs romans qui traitaient de l’existence d’un éventuel monstre. Sa mère lui en avait offert plusieurs, mais tous étaient restés au manoir. Qu’étaient ils devenus, ses précieux livres ? Peut être son père les avait ils donnés, jetés, brûlés. En tout cas, il n’en avait surement gardé aucun. Ce n’était pas vraiment le genre du personnage.

Quand la porte s’ouvrit enfin, elle eut un mouvement de recul. Un grand personne a l’air plutôt sinistre se tenait dans l’encadrement de la porte. Ce coup ci, elle ne put s’empêcher de masquer sa frayeur. Ses yeux avaient la même expression qu’une biche face à un chasseur ou que le petit chaperon rouge face au grand méchant loup.

*Grand-mère, que vous être grande, que votre costume me fait peur !*

-Pardonnez nous d’arrivez à une heure aussi ta ta tardive , s’entendit elle bafouiller, mm mais monsieur et moi-même sommes de nou nou nouveau étututudiants . Popour ma part, je vou voudrais me retsuarer un peut dans un en en droit chaud, le voyage fut fort long.

Le majordome inspecta les deux adolescents trempés et tremblants, puis sans un mot, il s’écarta afin de les laisser entrer. Amrit ramassa tant bien que mal ses valises puis suivit Alyosa Tiourine dans le grand hall… Après le froid du dehors, l’atmosphère du château lui sembla étrangement étouffante, comme si la cheminée était directement reliée aux salles les plus chaudes des enfers.
Le vieux majordome annonça, d'une voix grinçante:« Mademoiselle, Monsieur, permettez moi de vous débarrasser de vos manteaux. Avez-vous vos bagues du sceau de la rose ? Je vois que oui, bien, bien, ne les perdez surtout pas : On en distribue une seule et unique à chaque élève. »
Le monologue laissa Amrit bouche bée : Il avait rarement entendu autant d’allemand d’un coup, et il eut bien du mal à comprendre toute la tirade de Herr Vettel.
Finalement, il ôta son manteau de fourrure et le tendit aux mains ouvertes du majordome.
« Bien, bien, bien, la jeune demoiselle a faim. On va la conduire au réfectoire ou elle pourra se rassasier. Le jeune monsieur l’accompagnera-t-il ? »
Amrit hésita : Il n’avait pas vraiment faim, mais il se sentait on ne peut plus mal à l’aise à l’idée de laisser sa jeune camarade avec le vieil autrichien. Finalement, il murmura : « Herr, auriez-vous l’amabilité de nous conduire au ‘réflecsoire’, et de m’y offrir une tasse de thé ? » Il sourit au majordome, fier de sa prononciation du mot inconnu.
« -Un thé, bien sûr. La cuisinière se fera un plaisir de vous préparer un thé. Mademoiselle, monsieur, suivez-moi. Ne vous occupez pas de vos bagages, les domestiques s’en chargeront. »

[je conclus ici et tu commences au réfectoire ? ou l’inverse, comme tu veut ]

Quand Amrit formula le désir de prendre une tasse de thé, Alyosa lâcha un discret soupir de soulagement. . Au moins, elle ne resterait pas seule avec cet effroyable individu qui semblait si imbu de sa personne au point de les prendre légèrement de haut. En revanche, son camarade n’avait pas l’air très à l’aise en allemand. Le pauvre…si Alyosa s’était retrouvée face à des anglophones, elle aurait probablement commis plus d’erreurs encore.

Mais l’allemand était sa langue maternelle et elle le parlait parfaitement, sans même une once d’accent. Ce n’était pas le cas de son français, ou pis encore, de son anglais. Tandis que le majordome les guidait dans les couloirs, elle s’approcha doucement d’Amrit et lui souffla

-Merci be beaucoup , jeje croi que je n’au au aurait pas pu rester seulelele avec lui.

Tentant de maîtriser son bégaiement, elle ajouta

-Si vous avez le moindre souci en allemand, je peux vous aider dans la mesure de ce que je sais, bien sûr.

Toute une phrase sans bégayer! Hosannah au plus haut des cieux. Avec un peu de chance et beaucoup d’entrainement, elle se débarrasserait de cette petite manie empoisonnante. Sa mère serait fière d'elle

En parlant de mère, y avait il ici un endroit ou prier ? En effet, malgré les protestations de son époux, orthodoxe jusqu'au bout des orteils, la mère d'Alyosa l'avait élevée dans la religion catholique transmise par ses ancêtres autrichiens. Constance n'aurait pas toléré que sa fille ne remercie pas Saint Christophe après un voyage réussi.